Yves Viollier "Raymonde"

Oh Dieu, pourquoi donc en mourant ne nous as-tu pas mués en dieux ! Ma trajectoire quand je m'efforce de toute mon âme de la maintenir en droit ligne, si je me retourne elle ressemble à ces sillages laissés par les avions, dont le trait un instant précis, peu à peu se dissout, devient flou. Et tout est à refaire, tout s'efface, tout se ternit. Seigneur, donne moi un bout de ton crayon à la pointe si bien taillée, et guide ma main, que je fasse le portrait de ta création, que ce que j'écris te ressemble" Yves Viollier "Raymonde"

«Je ne suis pas assez méchante pour me donner en exemple» Sab plagiant Louis Ferdinand Céline

lundi 31 mai 2010

Mes nuits enfermées au "Musée de l'homme" de François Nourissier

Tout d'abord avant d'aller au fond du sujet, permettez moi ce coup de gueule envers les responsables du graphisme chez Folio. Quels sont le ou les neuneus qui ont pondu de telles couvertures horribles pour les livres de François Nourissier ? J'espère qu'ils sont soit à la retraite ou au chômage. S'ils sont encore en activité, qu'on les enferme dans un placard à double tour et qu'on jette la clé n'importe ou mais qu'on ne la retrouve pas.Sérieux, elles sont moches, poussiéreuses, bâclées... Horribles... De vrais repoussoirs pour la lecture des écrits de François. Pire un crime de lèse majesté. Qu'est ce qu'ils attendent pour relooker ces livres... Peut être mis à part "A défaut de génie" le reste doit être refait. Alors qu'on peaufine les nouvelles couvertures (comme celle d'Antoni Casas Ros, Jean Baptiste Del Amo... et celles de la collection 2 € qui sont elles des petites merveilles). Avec de telles couvertures, si on ne connait pas Nourissier, on a pas envie de le connaître...

Et cela serait une gravissime érreur...

François, la cinquantaine bien fêtée a écrit "Le musée de l'homme" pour faire le point sur sa vie. Mais au lieu de faire une simple autobiographie, il a décidé de faire la visite de son existence comme si on entrait au musée. Pour lui l'être humain est un musée qui s'ignore. Les oeuvres qu'il abrite sont les facettes de sa vie, de sa personnalité. François nous accompagne dans  les méandres de sa vie. Entre le portrait du père, du notable, de l'écrivain, du mari, du français moyen...Onze mini portraits écrit comme on peint un tableau.  C'est un régal. François ne nous livre pas tout, on le devine assez. J'avais l'impression de visiter son appartement, d'être avec lui sur une terrasse l'écoutant. Un vrai bonheur.

"Je ne me sens pas dans la peau d'un anarchiste nanti ni d'un magot d'académie. Je suis un homme instruit et fatigué par un demi siècle de route, d'un naturel moqueur revenu de quelques duperies, purgé de ses illusions, qui a redécouvert le bonheur et n'en est plus désarmé devant la molle résistance que lui oppose la vie, plus incrédule devant ses dérobades, ce flou  - cette "Fêlure" disait le cousin d'Amérique- contre quoi il bataille depuis si longtemps. Que la vie nous tue à petit feu, quoi de plus sûr ? Au moins espère-t-on donner du goût au bouillon et, à la cuisson, certaine allure. A prétendre être en possession de la recette, je mentirais."


J'ai eu du mal à imaginer le son de sa voix (que j'ai recherchée dans les archives INA).  Ce que j'aime chez lui, c'est qu'à chaque lecture de ses livres, je me sens enrichie d'une certaine sagesse. Comme s'il indiquait le chemin à suivre pour profiter de cette vie quotidiennement....

"J'en vins à expliquer à ma fille qu'avec n'importe quel épisode quotidien on peut tricoter la littérature : il suffit de se meubler la mémoire, et pour le reste faire confiance au miracle. C'est pourquoi je glissai dans ma poche en partant le menu du Ristorante Arche"

"Ce n'est pas vrai que la transmutation littéraire s'opère à partir de rien et sur n'importe quoi. Nous vivons la plupart des évènements de notre vie dans une distraction sans remède. Sur ce fond de grisaille il arrive que tel moment, tel personnage soudain prennent un relief et goût extraordinaires. Sans l'instant, tout le décor, comme on dit, se grave dans notre mémoire. Et surtout un phénomène se déclenche qui, faisant feu de tout bois aidera le jour venu à flamber avec le même éclat la mémoire et l'imagination. Ainsi vivons-nous les moments privilègiés dans un état de particulière attention, en sentinelles de notre propre vie".

Propos particulièrement émouvants et déchirants quand on connaît le calvaire qu'est devenue la vie de cet auteur avec l'Alzheimer et la Parkinson qui le rongent.

Mais il nous donne un ultime conseil, une sorte de leitmotiv... A suivre et à méditer...

"J'avais galéjé en prétendant qu'avec n'importe quoi l'on fait de la littérature ; il faut sentir passer, sur ce n'importe quoi, un frisson, un alizé d'excitation ou de plaisir qui le désigne à l'attention des amateurs de navigations"...


Cependant, je ne peux que vous conseiller avant la lecture de ce livre, celle de "Petit Bourgeois". "Le Musée de l'homme" peut être le second tome de ce livre... Et dépassez l'horreur des couvertures, le meilleur est à l'intérieur.

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