"Seraphine, de la peinture à la folie" Alain Vicondelet.

Rien à voir avec Yolande Moreau

Je ne voulais pas lire ce livre durant la "Moreau Mania" issue du film "Seraphine". Je trouvais d'ailleurs que le choix de cette actrice vraiment saugrenu. Seraphine n'a jamais été grande et grosse. Au contraire, elle était menue. Elle ressemblait plus à Annie Girardot (dommage que la maladie ait stoppé sa carrière, elle aurait été une sublime "Séraphine" tout comme Isabelle Adjani l'avait été pour "Camille Claudel"). Sans oublier que le rôle de Uhde aurait été parfait pour Patrice Alexsandre tragiquement disparu. Ce film a été tourné trop tard pour qu'il soit un chef d'oeuvre majeur du cinéma français.

J'ai donc attendu que cette "surmédiatisation" se calme pour pouvoir lire sereinement ce livre. En plus double raison, Alain Vircondelet est le parrain du Week end du Refuge du Livre de Grasla de cette année.

"N'aie crainte dit-elle à sa voix, je leur ferai des parures royales, des bouquets comme des manteaux de majesté. Je serai l'orfèvre du Bon Dieu".

Alain nous narre la vie de la Peintre Séraphine sous le prisme du mystique. La petite paysanne qui peint frénétiquement. Puisqu'il ne reste pas grand chose au niveau archives, documents officiels qui pourraient mieux éclairer le parcours particulier de Séraphine. Il préfère nous emmener sur des explications dont il est habitué. La recherche de l'acte mystique. Il ne faut pas oublier que Monsieur Vircondelet a écrit de nombreux livres sur les saints et les saintes (Thérèse d'Avila, Bernadette Soubirous, Jean Paul II...) et est donc un écrivain croyant, dit de littérature religieuse. Donc pour en revenir à Séraphine, il a essayé de comprendre pourquoi elle peignait et pourquoi elle le faisait de cette manière. Et aussi comprendre comment la folie s'est emparée d'elle. Quels en étaient les premiers signes.  

Un bémol cependant, la comparaison avec Camille Claudel. Certes ces deux personnes ont vécu des destinées semblables par leurs fins mais leurs vies étaient diamétralement différentes. Camille était issue d'une famille aisée et sa folie provenait d'une rupture sentimentale avec l'amour de sa vie. Rodin. Séraphine a toujours souffert, devenue orpheline assez tôt, était pauvre. Sa maladie venait de son immense solitude. Sa vie n'a été qu'un long désert à traverser.

Ce qui me surprend dans ce livre, c'est que j'ai pu faire aussi le rapprochement improbable à première vue mais pas si idiot avec Susan Boyle. Cette fille qui est une pauvrette. Qu'on a catalogué (trop vite peut être) de débile légère. Cette femme qui a passé sa vie à prier, à vivre dans sa petite maison, modestement qui devient la Diva grâce à sa voix. (Et aussi par la curiosité qu'elle suscite à cause de son physique ingrat). Susan Boyle est un peu l'héritière artistique de Séraphine. Et je ne serais pas surprise outre mesure qu'elle finisse comme elle en maison "de repos" suite à une dépression. Elle l'a été déjà juste après la finale de "Britain's got Talent". On la disait fatiguée mais elle avait pété un câble.  La seule différence entre Séraphine et elle, Séraphine travaillait que Susan vivait d'allocations et de "mendicité" de sa paroisse. Autres temps, autres moeurs.

Alain Vircondelet a écrit donc un livre pour ceux qui veulent trouver le sens dans les oeuvres de Séraphine. Une véritable introduction à la découverte de ce fabuleux et tragique destin.