Yves Viollier "Raymonde"

Oh Dieu, pourquoi donc en mourant ne nous as-tu pas mués en dieux ! Ma trajectoire quand je m'efforce de toute mon âme de la maintenir en droit ligne, si je me retourne elle ressemble à ces sillages laissés par les avions, dont le trait un instant précis, peu à peu se dissout, devient flou. Et tout est à refaire, tout s'efface, tout se ternit. Seigneur, donne moi un bout de ton crayon à la pointe si bien taillée, et guide ma main, que je fasse le portrait de ta création, que ce que j'écris te ressemble" Yves Viollier "Raymonde"

«Je ne suis pas assez méchante pour me donner en exemple» Sab plagiant Louis Ferdinand Céline

dimanche 5 juin 2011

"Pays perdu" Pierre JOURDE.



"Il me semble, lorsque j'y pense, que si, de la tête et de la poitrine, des mains qui frappent sur le clavier de l'ordinateur, glissent la feuille dans le fax, j'appartiens à ce monde aérien, où les informations volent sans cesse, où les richesses ne pèsent pas, mes pieds, mes jambes avancent encore, plus lourdement, dans la subtance épaisse d'un autre monde, disparu, avec ses chars à boeufs et son charbon, ses neiges et sa crasse, ses poules et ses jolis petits soldats morts" Pierre Jourde.


Résumé succinct, car l'histoire n'est que prétexte, fil rouge dans le livre, l'essentiel est ailleurs : Pierre et son frère vont au village de Lussaud. Non pas pour des vacances mais pour aller visiter la maison héritée du cousin Joseph. Ils participeront aux obsèques d'une jeune fille du village, Lucie, terrassée par un cancer. Ce qui permettra de revoir tous les habitants du hameau.


Pierre Jourde est un VRAI écrivain non pas un faiseur de livres. Je vais être obligée d'en mentionner la différence. 

En mon sens écrivain est celui qui patiemment, cherche des nouveaux styles d'écritures, nous fait voyager à travers ses phrases, cherchera à nous émouvoir ou nous questionner.


Le faiseur de livre utilisera toujours le même canevas, les mêmes situations, on ne change pas un truc qui a marché. Généralement son lectorat a la mémoire courte.  Ses livres sont vides d'émotions. Entre des pages blanches et ses écrits, pas de différence.

Je reviens donc à Pierre Jourde. Ne pas lire "Pays perdu" de nos jours serait une gageure. Ce livre nous pose plusieurs questionnements qui mériteraient une réponse.

1°) Le droit à l'image.
L'histoire narrée dans ce roman est une histoire vraie qui s'est déroulée en 1998. Pierre Jourde a vraiment porté le cercueil de la jeune fille.  N'oublions pas que dans le même endroit, Pierre avait enterré son père en 1988. Ils connaissaient bien les gens du hameau. Ils l'ont vu grandir au fur et à mesure de ses passages pendant les longues vacances scolaires.

Les enterrements sont propices aux rassemblements, aux retrouvailles. On resserre les liens distendus par le temps. Tous les habitants du hameau auvergnat se retrouvent donc dans la maison des parents de la défuntes et dans l'église.

Pierre Jourde voulait rendre hommage à ces gens là. Ces gens qui vivaient hors du temps, loin de la modernité et vivant en quasi autarcie. Mais cela se passe mal, dès parution de ce livre, les habitants se sont sentis salis par les descriptions crues et sans fard de leurs comportements. Ils iront jusqu'à aggresser physiquement l'écrivain et sa famille lors de vacances en 2005. 

La question se pose donc. As t'on le pouvoir de décrire les gens tels qu'ils sont ? Il est vrai que désormais avec le droit à l'image, à la bien pensance on a plus le droit de dire qu'untel est gros, nul, ou laid.  Pour ses habitants, je ne pense pas exactement à la connaissance du droit à l'image (ils auraient déposé plainte au lieu d'agresser Pierre Jourde), je pencherai plutôt pour une certaine intolérance chez les paysans. Un manque de recul de leur part mais en avaient ils l'apptitude intellectuelle ?

Comment donc décrire des personnages qu'en leur affublant que des qualités alors que l'être humain comporte des zones d'ombre ? 

J'ose même pas imaginer si un sociologue ou un chercheur était venu faire une étude sur eux.

2°) Un roman social voire historique.

Il reste de moins en moins de ce genre de hameau. La cause au désenclavement des régions forcené voté par les conseils généraux. Internet y est aussi pour quelque chose. Pierre voulait écrire un témoignage sincère de ces derniers réfractaires au temps modernes. L'ancienne France qui se perd. Certes tout n'est pas rose, on nage pas dans un épisode de la petite maison dans la prairie. Il y a l'alcoolisme récurent, seul échappatoire à une vie de labeur, d'ennui. Dans ce livre, pas de critique, seulement des instantanés comme on en ferait actuellement avec nos appareils photos numériques ou portables... La poésie en moins...

3°) Quid sur la littérature et authenticité ?
Peut on faire de la littérature tout en restant authentique. Sans sombrer dans la facilité de l'hagiographie ?  "Pays perdu" est la preuve irréfutable.
La plume de Pierre Jourde est vivante. Un français impeccable. En peu de pages, il va à l'essentiel tout en ménageant une certaine poésie. 

On n'en ressort rarement indemnes de la lecture des livres de Pierre Jourde. On continue toujours à se questionner sur ceux ci. C'est déjà une grande réussite.

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