Yves Viollier "Raymonde"

Oh Dieu, pourquoi donc en mourant ne nous as-tu pas mués en dieux ! Ma trajectoire quand je m'efforce de toute mon âme de la maintenir en droit ligne, si je me retourne elle ressemble à ces sillages laissés par les avions, dont le trait un instant précis, peu à peu se dissout, devient flou. Et tout est à refaire, tout s'efface, tout se ternit. Seigneur, donne moi un bout de ton crayon à la pointe si bien taillée, et guide ma main, que je fasse le portrait de ta création, que ce que j'écris te ressemble" Yves Viollier "Raymonde"

«Je ne suis pas assez méchante pour me donner en exemple» Sab plagiant Louis Ferdinand Céline

samedi 5 février 2011

"Il était un piano noir..." Barbara

"Plus jamais je ne rentrerai en scène.
Je ne chanterai jamais plus.
Plus jamais ces heures passées dans la loge à souligner l'oeil et à dessiner les lèvres avec toute cette scintillance de poudre et de lumière, en s'obligeant avec le pinceau à la lenteur, la lenteur de se faire belle pour vous.
Plus jamais revêtir le strass, le pailleté du velous noir.
Plus jamais cette attente dans les coulisses, le coeur à se rompre.
Plus jamais le rideau qui s'ouvre, plus jamais le pied posé das la lumière sur la note de cymbale éclatée.
Plus jamais descendre vers vous, venir à vous pour enfin nous retrouver.
Un soir de 1993, au Châtelet, mon coeur trop lourd de tant d'émotion, a brusquement battu trop vite et trop fort, et, durant l'interminable espace de quelques secondes où personne, j'en suis sûre, ne s'est aperçu de rien, mon cort a refusé d'obéir à un cerveau qui, d'ailleurs, ne commandait plus rien.
J'ai gardé, rivée en moi, cette panique fulgurante pendant laquelle je suis restée figée affolée, perdue.
J'ai dû interrompre le spectacle pendant quelque temps, puis définitivement.
Je suis quand même partie en tournée, deux mois après ; je raconterai ce que fut cette tournée, du premier jour au dernier soir.
Ensuite j'ai regagné Précy avec un manque immense, et, durant deux ans, j'ai fait le deuil d'une partie de ma vie qui venait brusquement de se terminer.
Ecrire, aujourd'hui, est un moyen de continuer le dialogue."




Voici les premiers mots de Monique Serf, dite Barbara. Une femme qui avait décidé de tourner la page et se consacrer à l'écriture. On ne présente plus l'immense Barbara. Sa voix, son look, sa fragilité qu'on percevait à chaque syllabe. Non, je n'ai pas envie de rabacher sur sa carrière de chanteuse, je voulais m'attarder sur celle qu'elle aurait pu être, une immense romancière.

JE HAIS LA DATE DU 24 NOVEMBRE. En 1991, disparaissait l'immense Freddie Mercury et en 1997, Barbara meurt d'une intoxication alimentaire...

Barbara après en avoir fini avec la scène ne voulait pas abandonner son public. Puisqu'elle ne voulait plus remonter sur scène, elle se décida à écrire.

"Il était un piano noir..." était une autobiographie. Elle avait commencé à l'écrire le 27 avril 1997 et n'a pas pu la finir. Les corrections ne sont pas faites, il manque des passages. Ce n'était qu'un cahier écrit d'un jet. Quand on lit ce petit livre, on a les écrits de Barbara. Brutes, sans ratures. Un style magnifique et poignant d'une femme qui s'est toujours battue. Battue contre son père qui la violait. Contre la misère la plus noire. Elle s'est battue afin de réaliser ses rêves les plus fous. Jamais se plaindre, toujours rester debout...

Barbara/Monique aurait pu être une des plus grandes romancières de ces dernières années si le temps lui avait donné le temps. Une fabuleuse érudition, des phrases simple à la grammaire parfaite (chose rare pour être notée). Barbara avait le don de la mise en scène, elle aurait pu inventer des personnages magnifiques, des descriptions des endroits d'une justesse... Même si ces fragments ne sont pas "parfaits" surtout les derniers, on imagine le travail de correction qui aurait pu se faire ensuite. Vraiment, je suis navrée qu'elle n'ait pas eu le temps.

Je laisse la paraole à Barbara....

"Il y a tant de plaisir à donner, à lire la joie et l'étonnement dans le refard de l'autre.Je ne crois pas que le manque soit toujours une necessité, mais je crois qu'il est important d'avoir manqué, eu froid, faim, mal, car cela permet de mieux reconnaître un jour celui qui souffre, de mieux lui venir en aide.
Ai-je assez partagé ?
Ai-je assez répondu à votre attente ?
J'ai reçu tellement d'amour, tellement ! Et toute cette énergie qui m'a fait avancer, chanter, qui m'a permis de faire ce métier comme j'entendais le faire : en désobéissant, en refusant tout les archétypes, en ayant un instinct de préservation qui m'a toujours empêchée de me perdre dans le compromis, la confusion.
Je ne détiens aucun secret, aucune formule magique.
Il faut prendre le voile, préserver son désir, ne jamais s'en départir, rester bien à l'interrieur de soi.
Exiger autant de soi que des autres.
"Vigiler" pour les autres autant que pour soi.
Vouloir avec une inentamable opiniâtreté.
Et sa vérité.
Ne jamais perdre espoir.
Vouloir recommencer.
Avoir peur mais avancer toujours.
En tout cas, sachez que c'est avec vous, par vous, pour vous que j'ai vécu, même si c'est aussi pour moi, bien sûr que j'ai chanté....

...j'étais prostrée, avec tout cet amour, ces regards, vos mains tendues. Mais malgré le deuil que je venais de commencer au terme de ma belle et intense vie de nomade, j'étais une femme heureuse."

Comment ne pas finir avec ces paroles prophétiques 

J'avais fini mon voyage
Et j'ai posé mes bagages
Vous étiez venu au rendez vous
Qu'importe ce qu'on peut en dire
Je tenais à vous le dire :
Ce soir , je vous remercie de vous 
Qu'importe ce qu'on peut en dire
Je suis venue pour vous dire :
Ma plus belle histoire d'amour,
C'est vous....

Aucun commentaire:

LinkWithin

Related Posts with Thumbnails